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L’importance des délais dans les cas de conduite avec facultés affaiblies

Par : Me Julie Couture | Publié le : 2 décembre 2020

L’honorable juge Marco Labrie a rendu une décision (R. c. Tremblay (2020)) le 9 juin dernier, dans laquelle il a acquitté l’accusé de conduite avec facultés affaiblies. Après évaluation du dossier, il s’avère qu’il subsistait un doute quant à la culpabilité de l’accusé.

 

La présomption d’identité

Ce jugement a été rendu sous l’ancienne législation régissant les infractions de conduite avec facultés affaiblies. En effet, avant le projet de loi modifiant le Code criminel le 18 décembre 2018, la législation était différente. L’avocat de l’accusé a donc fait valoir le droit de celui-ci d’être jugé selon les articles en vigueur au moment de l’infraction, et non selon les nouveaux articles. Puisque son client avait commis l’infraction avant le 18 décembre 2018, il a pu bénéficier de défenses qui étaient possibles sous l’ancienne loi mais qui ne le sont plus aujourd’hui.

L’avocat de l’accusé, dans cette affaire, a contesté la présomption d’identité de son client. L’ancienne loi prévoyait un délai maximal de deux heures avant la prise du premier échantillon d’haleine par le technicien qualifié. L’avocat de la défense a pu démontrer que les délais n’ont pas été respectés dans l’affaire en question. Ceci a pour effet de faire perdre la présomption d’identité à la poursuite. On soulève ainsi un doute quant à la culpabilité de l’accusé.

 

Comment utiliser une telle défense dans un procès pour conduite avec facultés affaiblies?

La question des délais est toujours importante, que l’infraction ou l’arrestation ait eu lieu avant ou après le changement de législation. En droit criminel et particulièrement en matière de conduite avec facultés affaiblies, il est primordial d’examiner la question des délais. Citons, par exemple, le délai maximal pour recueillir un échantillon d’haleine. N’oublions pas également le droit de parler à un avocat sans délai.

L’avocat pourra contre-interroger les policiers au tribunal, notamment au sujet du rapport qu’ils auront rédigé concernant l’arrestation. Il pourra tenter de démontrer que certains délais n’ont pas été respectés. Il pourra également attaquer la crédibilité de leur témoignage s’il y a des éléments qui ne concordent pas. Le but de ces manœuvres est de démontrer au juge que le témoignages des policiers n’est pas entièrement fiable. Si la fiabilité du témoignage est mise en doute, il ne peut pas servir à faire condamner l’accusé.

 

Décortiquer le témoignage des policiers

Dans l’affaire citée plus haut, c’est le témoignage des policiers qui constituait la principale preuve de la poursuite. Dans tout dossier, lorsqu’un policier procède à une arrestation, il doit rédiger un rapport concernant l’événement. Pour ce faire, il prend habituellement des notes contemporaines dans un calepin. Cependant, il arrive que les policiers ne prennent pas suffisamment ou pas du tout de notes. Il est également possible que ce soit un policier qui ait pris les notes et son partenaire qui rédige le rapport. Finalement, le rapport peut être rédigé plusieurs jours après l’événement. Chaque affaire est un cas d’espèce. Pour toutes ces raisons, il est possible que des erreurs se glissent ou que le rapport ne reflète pas entièrement la réalité de ce qui s’est produit.

Dans cette décision, les policiers revendiquaient une erreur dans leur rapport quant à l’heure de l’arrestation inscrite. Ils témoignaient au procès à savoir que la véritable heure était différente. Ils tentaient ainsi de démontrer que le délai maximal avait été respecté. Il s’agissait d’une question cruciale. Or, l’avocat de la défense les a mis en contradiction quant à leurs rapports. Il a ainsi réussi à miner leur crédibilité. Il a ainsi réussi à créer un doute quant à la culpabilité de son client. Le résultat escompté fut obtenu : un verdict d’acquittement.

 

Conduite avec facultés affaiblies : prouver hors de tout doute raisonnable

Un bon avocat saura relever dans un dossier les plus infimes détails qui pourraient jouer en la faveur de son client. Les procès ont généralement lieu très longtemps après que les événements se soient produits. Or, la mémoire de tous peut se révéler défaillante. Relever les contradictions dans le témoignage d’un policier ou de n’importe quel témoin de la poursuite, ça équivaut à mettre en doute sa parole et surtout sa mémoire. Le juge en conclura dont probablement que les faits relevant du témoignage en question ne peuvent pas être utilisés contre l’accusé.

En droit criminel, le fardeau est habituellement celui du doute raisonnable. Cela signifie que si le juge entretient un doute quant à la culpabilité d’un individu, il se doit de l’acquitter. C’est donc le rôle du juge d’évaluer la crédibilité et la fiabilité des témoignages entendus. Cela dit, c’est à l’avocat de la défense de démontrer sa preuve pour obtenir un acquittement.

 

Les paroles s’envolent mais les écrits restent

Dans le cas en question, le juge du procès n’a pas été convaincu par le témoignage des policiers. Il s’est plutôt fié au rapport des événements rédigé par ceux-ci. Grâce au contre-interrogatoire de l’avocat de la défense, le manque de crédibilité et de fiabilité du témoignage des policiers fut mis en lumière.

Dans cette affaire, la longueur des délais a été attribuée à des mesures administratives et économiques du poste de police concerné. Dans sa décision, le juge rappelle que de telles considérations ne peuvent justifier un délai déraisonnable. Les droits des accusés doivent être respectés, peu importe les problématiques administratives et budgétaires auxquelles font face les policiers.

 

Vous êtes accusé de conduite avec facultés affaiblies?

Nous ne le redirons jamais assez : chaque cas en est un d’espèce. Chez Couture Avocats, nous prenons le temps d’analyser la preuve de chaque dossier dans tous ses menus détails. Nous sommes toujours à la recherche de la fameuse « faille » qui nous permettra de construire la meilleure défense pour vous. En défense criminelle, la question des délais peut effectivement se révéler primordiale. Ceux-ci doivent être analysés dans l’ensemble des circonstances. C’est ce que nous rappelle le juge Labrie dans cette décision.

Lors d’une première consultation, nous prenons le temps de répondre à toutes vos questions et de bien analyser votre cas d’espèce. En vous écoutant attentivement, nous saurons définir quels sont vos besoins. Nous pourrons vous accompagner pour la suite et vous offrir la meilleure défense.

 

514-AVOCATE

julie

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